16/12/2008
_Off the main sequence_
Off the main sequence: Tom EASTON : Borgo Press : 2006 : ISBN 0-8095-1205-X : Trade Paperback : 350 pages (y compris index) : une quinzaine d'Euros en neuf port compris.
Ce livre est un receuil des critiques de par Tom Easton (auteur de SF plutôt technophile, particulièrement connu pour sa série 'Organic future') parues dans ANALOG entre 1988 & 2004. C'est une sorte de volume compagnon à Periodic stars qui traitait les oeuvres d'auteurs 'récurrents' (lire connus) d'où son titre.
Pour ce nouvel opus, Easton a choisi d'extraire de ses chroniques mensuelles dans ANALOG, tout ce qui est un peu atypique (d'où le titre en forme de clin d'oeil). Il s'agit plus de notules à vocation informatives que de véritables critiques structurées, la longueur de chacune étant au grand maximum d'une page, avec un minimum d'une dizaine de lignes.
Sont donc traités :
- les ouvrages de fiction parus dans des small presses (NESFA, Meisha Merlin, Tachyon...), qu'ils soient des romans, des anthologies ou des
recueils. Le tout tient sur une centaine de pages.
- les ouvrages de poésie (10 pages).
- les magazines à faible diffusion ou parution irrégulière (Pulphouse, On Spec...) sur moins de dix pages.
- les ouvrages sur l'écriture (moins de 10 pages).
- les ouvrages de référence en trois sections (histoire, critiques, autobio & biographies) sur cinquante pages.
- les ouvrages de vulgarisation scientifique (70 pages).
- les publications numériques (40 pages).
Les informations relatives à chaque titre (éditeur, ISBN, pagination) sont bien entendu données par l'auteur, ce qui permet soit de localiser un ouvrage, soit de l'acheter.
Au vu de la laconicité de ces notules et de la faible diffusion des ouvrages considérés, il est exclu d'utiliser cet ouvrage pour se forger autre chose qu'une simple première opinion sur les titres discutés. Easton est d'ailleurs dans un registre purement informatif, ne se laissant aller à des appréciations tranchées que très rarement.
Ce livre sera donc le plus utile dans un rôle de catalogue ou de guide d'achat, permettant de recenser et trouver des titres peu fréquents ou d'avoir une idée du contenu d'un ouvrage peu connu rencontré au cours d'une recherche.
Un deuxième usage, assez limité, sera de pouvoir juger de la réception initiale faite à tel ou tel auteur devenu célèbre, particulièrement s'il a été publié tout d'abord dans des éditions confidentielles. Le cas d'Allen Steele est à cet égard typique, puisque l'on peut assister en filigrane à sa découverte et à sa maturation au travers des notules d'Easton. En effet, avant de devenir la vedette qu'il est, ses premiers livres ont été édités par des small presses (Rude astronauts ou All-american alien boysont sortis chez Old Earth Books et d'autres chez Meisha Merlin avant d'être repris par Ace).
Un ouvrage dont l'intérêt est nettement limité, malgré ses qualités intrinsèques.
Note GHOR : 1 étoile
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15/12/2008
_10 Catastrophes_ & _10 Récits sur le temps_
10 Catastrophes: Fréderick BAAS & Alain GARGUIR & Yves MOUQUET : Maison de la Fiction : 1988 : ISBN -10 2-87765-000-6 : 43 pages : quelques Euros en neuf via e-bay pour un chapbook.
10 Récits sur le temps: Fréderick BAAS & Alain GARGUIR & Yves MOUQUET : Maison de la Fiction : 1988 : ISBN -10 2-87765-001-4 : 43 pages : quelques Euros en neuf via e-bay pour un chapbook.
Ces deux petits ouvrages sont donc des guides de lectures destinés (je paraphrase) à aider les lecteurs ou les intervenants littéraires à se retrouver dans le maquis de la SF et à constituer une bibliothèque de base sur les thèmes abordés.
Ils partagent la même architecture :
- Une introduction sur le principe des ces guides.
- Un mode d'emploi.
- Une présentation du thème (2 pages).
- 10 fiches de lecture comprenant une sorte de fiche technique (style carte d'index de bibliothèque) et une courte fiche de lecture (1 page).
- Un lexique.
- Une bibliographie annexe (une vingtaine de titres supplémentaires).
Pas grand chose à dire sur ces ouvrages. La sélection des textes étudiés est classique. On va de Anderson à Wells pour le temps et de Ballard à Wylie pour les catastrophes. Le mélange entre textes récents et anciens est correct (de Barjavel à Powers) et les équilibres nationaux respectés (30% de francophones + 1 allemand).
Les notes de lectures sont très brèves (une quarantaine de lignes au total) et se bornent à un résumé du texte suivi d'un paragraphe d'évaluation. Dans la pratique ce sont donc plutôt des notules et leur côté hyper-schématique vaut aussi pour le reste des guides (les présentations par exemple).
Ajoutons quelques bugs dans les fiches techniques et on obtient des ouvrages dont la plus-value me parait bien mince et l'objectif peu clair.
En fait, le point le plus intéressant est, en ce qui me concerne, la tentative que l'on voit transparaître au fil des pages d'une codification des genres de la SF. Ce projet de taxonomie du genre est un serpent de mer qui resurgit périodiquement et auquel tout fan s'est attelé au moins un fois dans sa vie. C'est un vieux rêve que de pouvoir classer tout ouvrage de SF dans un schéma global et bien ordonné.
Comme souvent, cela vire à l'usine à gaz géante avec une multiplication des critères pour pouvoir rendre compte des caractéristiques de chaque oeuvre.
Ici, on a donc pour chaque texte (entre parathèses les valeurs pour un des titres) les critères suivants : un thème (Temps) et un sous-thème (Voyage), un cas (Ramification), un genre (Time-opéra) un genre-bis (Aventure), une caractéristique (Maîtrise), un type (Machine) et une forme (R<N).
Pour info cet ensemble de critères permet de définir La patrouille du temps.
Trop complexe, cette brillante construction intellectuelle s'effondre sous son propre poids en à peine 20 oeuvres, sans atteindre les 42210 univers de la SF de l'inénarable Guy Bouchard.
Note GHOR : 1 étoile (pour le côté sympathique de cette entreprise fanzinesque)
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12/12/2008
_Science-Fiction : Les frontières de la modernité_
Science-Fiction : Les frontières de la modernité : Raphaël COLSON & André-François RUAUD : Mnémos : 2008 : ISBN-13 978-2-35408-044-0 : 349 pages (y compris biblio et index) : 24 Euros en neuf pour un TP (solidité à voir).
Cet ouvrage est une histoire de la SF qui commence au XVIème et se termine au XXIème. Elle couvre tous les médias associés au genre (textes, BD, comics, TV, Jeux, Manga, Cinéma, DA...) et fait le choix de largement insérer la SF dans le contexte historico-géographico-socio-économique des époques et des lieux de production.
Il est donc logiquement organisé de façon (globalement) chronologique en quatre parties principales :
- Les précurseurs (XVI, XVII & XVIIIèmes).
- L'imaginaire européen (XIXème).
- L'imaginaire américain (XXème).
- L'imaginaire asiatique ? (XXIème).
Chaque partie est ensuite découpée d'une façon peu claire, d'abord sur des critères temporels, puis géographiques (par aire de production) et parfois thématiques.
Suivent une bibliographie (sommaire et écrite gros) et un index. On notera la présentation du texte sur deux colonnes (sauf bizarrement les seules pages 224 & 228) agrémentée d'illustrations N&B de taille variable, parfois non légendées et/ou non attribuées aux illustrateurs (pour les couvertures de livres).
Voilà un livre qui commence mal. A la fois sur le plan formel puisque dès la première page, on a une jolie petite coquille avec une citation de FrederiCk Pohl (il n'y a guère que les Pdf qui font cette erreur), mais aussi sur le plan de l'esprit puisque les auteurs nous affirment (sans rire) qu'ils sont les premiers à s'être rendus compte que la SF est un genre multi-média et qu'ils vont donc nous proposer le premier ouvrage qui aborde la SF dans sa globalité. Ce petit liminaire est utile parce qu'il permet bien de percevoir la tonalité globale du livre, un mélange de didactisme parfois pédant et d'approximations.
Pêle-mêle, quelques (je n'ai pas tout relevé) points sur cet ouvrage :
1) Pas cher ?
Un commercial bénévole des éditions Mnémos en a fait la réclame dans pas mal d'endroits du net en mettant en avant son prix attractif. 24 euros pour un TP, c'est déjà un niveau de prix non négligeable (le HC de CSICSERY-RONAY est dans les mêmes eaux), surtout pour un livre qui s'abîme assez facilement (le mien est déjà rayé). Mais en fait, ce qui m'a fortement défrisé est le fait que ce livre reprenne de très larges pans du précédent opus du couple Colson & Ruaud, La SF, une littérature du réel (voir http://groups.google.fr/group/fr.rec.arts.sf/msg/c0021b1d...).
Cette reprise concerne essentiellement la 3ème partie (la SF du XXème siècle) et est faite quasiment mot à mot, recopiant d'ailleurs telles quelles les erreurs (le couplet sur le Ace D-118, voir http://groups.google.fr/group/fr.rec.arts.sf/msg/a136debf...) ou coquilles que j'ai déjà relevées (le fameux Gordon VON Gelder ou le magazine Starling). On a évidemment le droit de réutiliser ses propres travaux, mais la simple honnêteté voudrait que l'on en informe l'acheteur, chose qui n'apparaît nulle part, ni sur le livre ni dans le buzz autour de lui.
Du coup et pour s'amuser, on pourrait rajouter aux 24 Euros une partie du prix de l'ouvrage qui est incluse dedans puisque l'on a déjà payé pour ce texte, celà nous mène dans les 30 Euros, tarif nettement moins réaliste.
2) Ça parle de quoi ?
Le thème du livre étant la Science-Fiction (c'est en tout cas ce qui est écrit dessus), je trouve que l'équilibre même du livre est bancal.
En effet, il se divise (en terme de quantité de texte) en trois tiers : un tiers de contextualisation (historico-géographico-socio-économique), un tiers consacré à la proto-SF (avant l'invention du terme) et un tiers à la SF (après l'invention du terme).
Le premier tiers est largement superflu et devient même pénible à lire. Même s'il est souhaitable de placer la SF dans son environnement sociétal, les auteurs en font trop, avec (c'est juste un exemple) des pages entières consacrées à la politique du gouvernement japonais en matière de recherche où l'on peut même trouver le pourcentage du territoire japonais raccordé à l'ADSL en 2006 & 1995 (86% et 15% pour les curieux). On croirait parfois lire des articles entiers de wikipedia à chaque début de chapitre. C'est sûrement très bien pour la culture générale du lecteur (bien que ce soit très grossier quand même, on ne résume pas 5 siècles d'histoire en 50 pages), mais la proportion est trop importante pour un ouvrage sur le genre.
Le deuxième tiers se consacre à la proto-SF et lui offre la moitié de la pagination (on arrive en 1914 à la page 144) suivant le canevas habituel : More-blabla-Kepler-blabla-Mercier-blabla-Shelley-blabla-Wells-blabla-Verne. Il y a à un moment une justification assez savoureuse pour l'inclusion de tant de textes que personne n'a lu et ne lira jamais (je cite de tête) : "c'est quand même une masse de 500 ouvrages sur 30 ans", chiffre à rapporter aux 2000 livres de SF/F littéraire parus par an chez les seuls anglo-saxons. C'est vraiment super la proto-SF, mais c'est justement pas de la SF (d'où son nom) et c'est surtout sans aucun intérêt sur une telle longueur consacrée à des oeuvres inaccessibles (et certainement illisibles en l'état).
Ces deux tiers phagocytent malheureusement donc le troisième tiers (la SF après la 1ère GM en gros), pourtant celui qui est le plus pertinent pour l'étude et la perception du genre.
3) La SF se réduit-elle aux Moutons ?
On peut légitimement se poser cette question. En effet, ce livre fourmille littéralement de références à des ouvrages de cet éditeur. A la louche, une note sur deux (sur la SF) fait référence à un livre des Moutons (divers numéros de Fiction, le RAH, l'Anderson et le PKD), ce qui, indépendamment de la qualité de ces ouvrages, est loin de refléter la réalité de la réflexion sur la SF. Ce problème d'auto-promotion (pour ceux qui ne le savent pas, les moutons sont justement une firme dirigée par les deux co-auteurs, merci rmd) était déjà présent dans le précédent ouvrage mais il atteint ici des proportions inouïes.
Cela nous vaut des sauts chronologiques surprenants : Fournaise la novella de Kelly (2005, éditée par les moutons) est placée dans la période 1977-1982 sans doute pour pouvoir être citée. Cela amène aussi à des inclusions insistantes : Coney (un auteur mouton aussi) réussit à être cité à deux endroits dans le texte (dont une fois d'une façon fort peu logique) avec en prime la mention de son livre chez l'éditeur (une soi-disant intégrale qui ne l'est bien sûr pas). J'ai même fini par comprendre pourquoi on parlait tant de zombies dans ce livre, alors que c'est un concept qui n'est pas vraiment central en SF : SURPRISE ! il sort un ouvrage sur ce thème en 2009 chez les moutons et dont un des auteurs est Colson. Que l'on souhaite développer son entreprise est normal mais un tel manque de subtilité est un peu méprisant pour le client.
4) Du brouillard ?
L'impression générale de cet ouvrage est celle d'un flou permanent, avec des idées peu claires (par exemple, le concept de SF comme littérature de la civilisation qui fonde le livre est abandonné à mi-parcours) et des affirmations toujours sujettes à caution dans leur formulation ou leurs éléments soi-disant factuels.
Pour essayer d'expliquer ce que j'entends par là, je vais prendre un exemple, avec cet extrait (page 225) :
A en croire Stan Barets, "Cordwainer Smith est l'auteur favori de tous les vrais amateurs de SF, le nom que se transmettent en secret tous les vrais aficionados". C'était peut-être vrai lorsqu'il écrivait ces lignes (173, Le science-fictionnaire, Denoël, 1994), mais depuis sont parues une intégrale américaine chez NESFA, une première intégrale française chez Pocket puis une autre chez Folio-SF, et l'on peut donc raisonnablement supposer que Smith n'est plus un tel secret...
On relèvera donc :
- citation de Barets = première erreur (^_^).
- erreur de Barets qui néglige (il écrit cela en 1994), l'édition LDP (1980), l'édition Pocket (1987) et surtout la parution (partielle) chez France Loisirs. Un écrivain secret paru chez France Loisirs, c'est un concept puissant.
- Colson/Ruaud citent l'édition Pocket et semblent la penser comme postérieure à Barets, ce qui est faux (1987 pour l'EO non argentée, je le répète).
- l'intégrale NESFA (tirage limité, organisation de fans) date de 1993 (pour le recueil des nouvelles). Elle est donc elle ausi antérieure à la citation de Barets. Mais c'est typiquement un produit qui ne sort jamais du cercle des aficionados, on ne peut donc se baser sur elle pour soutenir l'idée d'un retour à la popularité de Smith.
- par contre Colson/Ruaud oublient (la connaissent-ils) à la fois la disponibilité, certes partielle mais attestée, de Smith en VO pendant des années (Ace, Del Rey, Sphere...) et surtout la publication de Smith par Baen cette année qui va toucher un public infiniment plus large que celui de NESFA.
Ce petit paragraphe est donc le mélange d'une citation inexacte à la base (donc non vérifiée par les repreneurs) et d'oublis ou d'erreurs d'analyse supplémentaires propres au couple Colson/Ruaud. Du n'importe quoi présenté comme du solide. C'est justement ce sentiment que j'ai eu pendant une grande partie de la lecture.
5) Et les goodies de Hervé ?
Éprouvant toujours un plaisir vicieux à traquer les erreurs dans les ouvrages de référence, je dois avouer qu'il y a de quoi se régaler ici.
Voici donc une courte sélection :
- De la petite coquille, style "mini-mock" (la voiture de la série Le prisonnier) et autres.
- De la grosse coquille qui montre que les titres ne sont pas compris : Erewohn qui du coup n'est plus l'inverse de Nowhere (bétîse de ma part), ou le titre du roman de Merrill qui passe de Shadows on the hearth (et les associations voulues avec la sphère domestique) à Shadows on the earth.
- Une chronologie à la PKD : R C Wilson est placé dans la période 1947-1957, l'histoire du futur de RAH est datée 1950-1963
- Des affirmations idiotes : Blue thunder (le film et la série TV mettant en scène l'hélicoptère homonyme, en VF Tonnerre de feu) traitant des extraterrestres, Doctor who jamais diffusé en France (diffusé en 1989 sur TF1 et passant en ce moment sur France 4 et ce depuis quelques années), Zenna Henderson comme, je cite, "une des toutes premières plumes féminines", merci pour les centaines de femmes qui ont écrit de la SF avant elle, une jolie confusion (avec coquille en plus) entre deux livres d'Or en note de page 224 (entre celui d'Orbit et celui propre à Knight que les auteurs ont l'air de croire identiques).
- Des défis lancés aux lecteurs que les auteurs sont sûrs de perdre (celui-ci est déjà présent dans l'ouvrage précédent) : "Examinez n'importe quel numéro récent de Analog pour vérifier que la novella est un format courant". Je l'ai fait : sur 2008 (10 numéros et plus de 60 textes), il y a en tout et pour tout 4 novellas. Vous avez donc moins d'une chance sur deux de tomber sur ce fameux "format courant". Encore une bien belle affirmation, bien autoritaire qui, à l'examen des faits, se révèle être une pure invention.
On va encore m'accuser de m'acharner sur un ouvrage en VF, mais cette tentative d'une histoire de la SF s'enlise rapidement, en particulier dans l'histoire tout court et la préhistoire du genre. Pas assez rigoureux, mal construit, trop bavard, cet ouvrage marque toutefois un progrès par rapport à son prédécesseur du même duo, en particulier par ses apports sur la SF japonaise.
A ce prix, il vaut quand même attendre de trouver un SP d'occase.
Note GHOR : 1 étoile
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11/12/2008
_Where no man has gone before : Women and science fiction_
Where no man has gone before : Women and science fiction: Lucie ARMITT (éditirice) : Routledge : 1991 : ISBN 0-415-04448-0 : 234 pages (y compris index + bibliographie) : une dizaine d'euros en occase pour un TP.
Ce livre est un recueil de 13 essais (inédits lors de la parution du livres, puis parfois repris pour certains, IIRC) explorant les rapports entre la SF (ou la fantasy) et les femmes, à la fois quand elles sont actrices (auteures), sources de réflexion ou sujets (personnages).
Il est divisé en trois grandes parties :
- Quatre essais sur des auteures traitées individuellement, à savoir Haldane (pour Man's world), Burdekin (pour son étonnante dystopie nazie écrite en 1931 : Swastika night), C. L. Moore, Le Guin & Lessing (les deux dernières étant des passages obligées pour ce type d'ouvrage à orientation féministe).
- Cinq essais sur l'image de la femme dans la SF, tant écrite que cinématographique (deux essais dont un sur Starman et Blade runner qui est assez féroce dans sa critique plutôt pertinente d'un film culte qui peut se lire comme éminemment patriarcal).
- Quatre essais qui analysent le genre et/ou ses lecteurs (juveniles, fantasy Arthurienne...).
Les diverses contributrices (100% féminines) sont les "usual suspects" de ce type d'exercice (l'essai) pratiqué dans ce contexte idéologique (une approche féministe) : Tuttle, Lefanu, Jones, Saxton.
Que dire de cet ouvrage ?
Tout d'abord, il s'inscrit dans une lignée importante d'ouvrages du même type, visant (pour les pires) à annexer la SF comme auxilliaire d'un féminisme militant ou à la dénoncer comme outil d'oppression à la solde du patriarcat ou (pour les meilleurs) à montrer que le genre SF est/a été un espace d'expression pertinent pour faire avancer les choses ou pour mener une réflexion sur les rapports entre les sexes.
Ce livre emprunte une voie médiane, en ce sens qu'il ne peut s'empêcher de reprendre pour partie des arguments et un vocabulaire devenus caricaturaux (les éternelles théories sur homme=soleil=bien, femme=lune=mal) ou de sombrer dans les lieux communs sur la SF. Clichés dont la partielle fausseté (les fameuses femmes écrivains forcées de prendre des pseudos féminins pour cacher leur sexe) a été démontrée dans des ouvrages sérieux. Pour rester bien dans la ligne, nous avons droit aux traditionnels et inévitables couplets laudatifs sur Le Guin, Russ ou Bradley (qui joue parfois dans les deux camps) et aux railleries non moins obligées sur les 'traîtresses à la cause" comme McCaffrey.
Une fois ces tics (surtout agaçants par leur prévisibilité) mis de côté, cet ouvrage offre malgré tout un certain nombre de discussions solides :
l'étude de Gamble sur C. L. Moore et les symboliques sexuelles est bien faite et convaincante; le décryptage des stéréotypes féminins dans Blade runner ou dans Rite of passageest exécuté avec calme et précision, ce qui rend la démonstration assez percutante; le texte de Jones sur les juvéniles est intéressant et la démonstration par Moody de la logique de l'usage d'un cadre "Arthurien" pour des textes à visées féministes est parfaitement claire.
Dans ce cadre, le texte final de Saxton est une note dissonante et une faute de goût, puisque l'ouvrage se termine par une diatribe de cet auteure qui dit en gros que l'on a mis ses textes dans la SF à tort (la fameuse "défense Atwood" avant l'heure) et que maintenant elle a décidé de se libérer de ce carcan et de quitter ce genre de médiocres. Elle va donc se mettre enfin à écrire la littérature (avec un grand L) qu'elle veut (mais sous un pseudo, comme quoi les réalités du marché s'imposent même aux idéalistes). Cette position courageuse et intègre honore sûrement son auteure mais ressemble fort à un crachat final dans une soupe (généralement) défendue par ses collègues et pourrait être perçue comme un manque de respect pour le cochon (machiste ou autre) de payant.
En conclusion, il s'agit d'un livre qui présente de bons passages, mais reste handicapé par son hétérogénéité marquée (normale pour un recueil d'essais de différentes mains) et un certain manque d'originalité (pour qui pratique ce genre d'ouvrage).
Note GHOR : entre 1 et 2 étoiles suivant la familiarité du lecteur avec le discours féministe sur la SF
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08/12/2008
_The country you have never seen : Essays and reviews_
The country you have never seen : Essays and reviews : Joanna RUSS : Liverpool University Press : 2007 ; ISBN 978-0-85323-869-0 : 305 pages (y compris index) : une trentaine d'Euros pour un TP, assez cher pour un ouvrage d'une qualité de fabrication moyenne.
Ce livre est un recueil de divers types de textes de Jonna Russ, une auteur de SF surtout connue pour ses écritis et positions féministes, principalement le roman The female man.
Il se compose de trois parties inégales :
- "Reviews" (200 pages), rassemble une partie des critiques/chroniques écrites par l'auteur. Il s'agit soit de textes traitant de fictions de SF (datant principalement des années 70) et parues dans The magazine of F&SF, soit des critiques sur des ouvrages théoriques sur le féminisme ou le lesbianisme parues dans divers supports spécialisés. Ces critiques traitent d'un (pour la non SF) ou plusieurs (pour la SF) ouvrages, consacrant à chaque livre évalué une longueur variable allant d'une dizaine de lignes à deux ou trois pages.
- "Essays" (50 pages) contient 6 essais (datant des années 70-80 et ne contenant pas d'inédits) allant de plusieurs textes sur les problématiques du genre (au sens de sexe) dans la SF, à une entrée du Twentieth-century science fiction authors sur Lovecraft (dont on peut se demander pourquoi et comment Russ a été considérée comme une spécilaiste de l'auteur).
- "Letters" (50 pages) contient une vingtaine de lettres (ici encore datant des années 70-80) de Russ à diverses revues, sur des sujets n'ayant généralement aucun rapport avec la SF mais concernant le féminisme ou le lesbianisme. Ces lettres ne sont partiellement contextualisées à l'aide de notes de l'auteur.
Le premier point qui vient à l'esprit après la lecture est qu'il y a certainement tromperie sur la marchandise. Tromperie portant non pas sur sa qualité mais sur sa description. En effet, cet ouvrage est blurbé (et fait d'ailleurs partie d'une collection dédiée) comme étant clairement un ouvrage SUR la SF :
"The Country You Have Never Seen gathers Joanna Russ's most important essays and reviews, revealing the vital part she played over the years in the never-ending conversation among writers and fans about the roles, boundaries, and potential of science fiction. Spanning her entire career, the collection shines a light on Russ's role in the development of new wave science fiction and feminist science fiction, while at the same time providing fascinating insight into her own development as a writer."
Hors, à la lecture, on peut estimer que pas loin de 50% du livre ne sont pas consacrés à la SF mais aux autres sujets qui passionnent Russ : la politique des genres, le féminisme, le lesbianisme. A titre d'exemple, un des ouvrages critiqués à loisir est un livre qui s'intitule Surpassing the love of men : romantic friendship and love between women from the renaissance to the present, ouvrage au sujet clair, certainement très intéressant mais dont l'objet est bien loin de la SF.
Indépendemment de la qualité des livres chroniqués et de celle de la chroniqueuse, ce n'est clairement pas le produit annoncé et, à ce prix (une trentaine d'Euros pour un livre broché, je le rappelle), je ne peux que le regretter. C'est d'autant plus dommage qu'il doit bien exister d'autres textes de Russ qui traitent vraiment de SF et qui restent inédits en volume (les autres chroniques dans F&SF par exemple) et qui auraient naturellement trouvé leur place dans cet ouvrage.
Sur la partie purement SF, si les essais de Russ sont toujours aussi pertinents, et même si le temps et certaines ré-évaluations théoriques ont fait nettement évoluer les problèmes de l'écriture ou de la représentation féminine dans la SF, je n'ai guère était enchanté des critiques d'ouvrages SF.
Ces critiques me semblent à la fois trop lapidaires ("c'est un truc de sale machiste"), trop peu soutenues par des éléments factuels (si ce ne sont de nombreuses citations de phrases soit disant mal écrites, chose qui ne m'a pas parue évidente, mais je ne suis pas locuteur anglais primaire) et concentrées sur des cibles qui en veulent peu la peine.
Par exemple, il est dommage de voir, au détour d'une chronique, que Russ dit de Dune que c'est un "third-rate book" (chose qui peut se défendre) sans aucune justification supplémentaire, alors que cela aurait pu être le début d'une réfutation intéressante, par exemple sous l'angle du rôle et de la position des femmes dans l'univers de Herbert.
De plus, j'ai trouvé le ton de Russ assez désagréable, une écriture qui oscille entre le "colloquial", le revendicatif et le théorique et qui, malgré certaines vaines tentatives, manque totalement d'humour (ou d'un humour que je puisse comprendre ou apprécier).
Et puis, écrire dans une revue professionnelle que tel texte lui rappelle tel autre mais qu'elle a la flemme de chercher lequel, cela s'appelle se moquer du lecteur.
En gros, Russ n'est pas Atheling (pas le savoir), Knight (pas la pointe acérée mais juste) ou Clute (pas l'ironie délicieuse).
note GHOR : 1 étoile
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